Black Lights, le manifeste féministe de Mathilde Monnier renverse le Cloître des Carmes du Festival d’Avignon
L’immense chorégraphe s’empare de la série H 24 d’Arte pour la traduire en corps parlés. Une pièce militante à la beauté et à l’énergie urgentes.
H24 de de Nathalie Masduraud et Valérie Urréa est une série de 24 courts métrages. Chaque épisode est une heure de la journée. Vingt-quatre heures donc de petites phrases, de petits gestes que les femmes subissent au quotidien. La série comme la pièce de Mathilde Monnier vient réparer le silence sur ce n’est “pas grand chose”, ces “il ne m’est rien arrivé”, ces “il ne s’est rien passé de grave”.
Sur scène, le groupe est composé de danseuses et de comédiennes. Mais toutes dansent et parlent. Sans aucune littéralité, le spectacle vient choisir des séquences de la série et les délivrent dans le sens qui convient à la dramaturgie.
Du côté de la danse, on retrouve Mathilde Monnier à son apogée dans une montée en puissance qui va du sol à la verticalité pour enfin exploser dans une danse de transe, fière, libérée.
Elle travaille au commencement à désarticuler les corps. Les danseuses manipulent leurs jambes comme si elles étaient inertes pour dire la sidération que toute femme a, au moment où quelqu’un vous hèle dans la rue, faisant de vous la proie chassée, prête à dégainer son arme de défense : “j’ai souri”, “je suis polie”.
Après la révolution #Metoo, beaucoup de comportements ont changé, la déconstruction de la pensée masculiniste fait son chemin, mais ce que dit la pièce en corps, et la série en images, c’est que tant que les femmes ne se mettront pas devant, en faisant hurler leur geste dans un mouvement ré-articulé, d’une énergie cathartique, le combat sera perdu.
Mathilde Monnier signe un manifeste magnifique qui libère la parole dans le public après la représentation. Plus jamais, Mathilde, on ne dira “ il ne s’est rien passé”.
Merci.
Avec : Isabel Abreu, Aïda Ben Hassine, Kaïsha Essiane, Lucía García Pullés, Mai-Júli Machado Nhapulo, Carolina Passos Sousa, Jone San Martin Astigarraga, Ophélie Ségala
Jusqu’au 23 juillet. Puis du 29 novembre au 2 décembre, au Théâtre de la Cité Internationale.
Visuel : Christophe Raynaud de Lage
21 JULY 2023 | PAR AMELIE BLAUSTEIN NIDDAM
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