Femmes publiques
Danse. Mathilde Monnier ressuscite dans «Publique» l'ivresse des années 70.
En misant sur l'égérie rock anglaise P. J. Harvey, la
chorégraphe Mathilde Monnier savait pertinemment ce qu'elle faisait.
Pour sa création Publique, elle met en scène neuf furies, perruquées,
endiablées, qui réactivent l'ivresse des années 70. On croit qu'elles
font la fête, qu'elles dansent entre elles et que tout est lâché.
Nenni, Mathilde Monnier a étudié les moindres gestes qui allaient
servir son propos chorégraphique. Cela donne une pièce en un bloc où la
danse se vit comme une expérience en direct et fait référence autant
aux pratiques privées que publiques. Neuf femmes publiques, il fallait
bien autant de danseuses pour constituer un corps de ballet qui tienne
la piste de danse.
Chaque donzelle en empathie avec l'autre, sans
que le toucher soit le mode de communication, fait sa rave. Les
ballerines qui semblent tout droit sorties de l'usine, après avoir
échangé un bleu de travail contre une tenue plus aguicheuse, s'en
donnent à coeur joie pour dégager, selon l'expression de la
chorégraphe, un «laisser-aller du mouvement». Chacune adresse sa danse
à une autre protagoniste. De la même façon, les interprètes échangent
quelques vêtements.
C'est le souk dans la chambre des filles et
rien ne peut les retenir dans leur élan, dans leur force de
proposition. Mathilde Monnier fait elle-même partie de la bande. Elle
est sur le plateau et elle change sa manière de composer. La directrice
du Centre chorégraphique national de Montpellier, qui à chaque
spectacle trouve sa manière de travailler avec son équipe, fait ici
confiance aux danses improvisées, aux danses de boîtes ou de soirées
allumées. Elle a raison. Les danseuses rayonnent, elles aussi. Un
spectacle toute publique.
Par Marie-Christine VERNAY
libération
19 octobre 2004