A bout de souffle
Quand la chorégraphe Mathilde Monnier prend comme point d’appui pour sa nouvelle création un ballet classique, à quoi peut-on s’attendre ? A tout sauf à de la danse classique ! La directrice du Centre chorégraphique de Montpellier s’intéresse à La Mort du cygne. Non pour en faire une énième adaptation, mais plus pour en saisir les spécificités et les retranscrire très librement. Créé en 1907 par Fokine pour la danseuse Anna Pavlova, ce ballet se distingue par sa forme, un solo, par sa durée, 3 minutes, et par son recours à l’improvisation. Au-delà de l’aspect formel, Mathilde Monnier s’intéresse à travers cette pièce à l’idée d’un mouvement qui ne veut pas mourir, inlassablement réactivé, réinventé. Alternant solos et danses de groupe, les 9 danseurs qui hantent Pavlova 3’23’’ semblent vaciller, près à rompre à de multiples reprises. Puis se ressaisissent, recommencent inlassablement leur procession. Mais n’ayez crainte rien de morbide dans tout cela ! Monnier traite cette grande question existentielle qu’est la mort avec humour et distanciation. Tout comme Jean-Luc Godard peut le faire dans ses films : le personnage meurt, joue la mort, se relève, sourit à la caméra et disparaît. Voilà un moyen de plonger dans la fiction ce qui dérange dans le réel. Toujours très bien entourée musicalement, la chorégraphe a passé commande à plusieurs compositeurs dont eriKm et Heiner Goebbels. Et, cerise sur le gâteau, la voix chaude et ténébreuse de Rodolphe Burger vient envahir le plateau avec délectation.
vc / let's motiv octobre 2009