mathilde monnier & dominique figarella
création du 4 au 6 juillet 2010 . festival montpellier danse
Quand j‘ai rencontré Dominique Figarella, j’ai cherché en quoi son travail m’avait autant frappé et ce qui pouvait trouver un sens sur scène. La première chose a été l’échelle de grandeur et la façon dont Dominique perçoit ses formats. Ceux-ci sont assimilables pour moi à des plateaux, à des scènes.
D’autres éléments m’ont intéressé : l’intégration dans le tableau du geste du peintre par la photo, le rapport aux objets inscrits dans la surface, et surtout le choix de certains matériaux et techniques : chewing-gum, transparence, plumes, tâches. Certains de ces matériaux font référence à des processus inconscients liés au mouvement, comme l’élan, le jaillissement, l’éclat, l’explosion, l’énergie.
La relation danse / peinture s’inscrit dans une longue tradition où le peintre entre dans l’univers de la danse et de la scène par le biais du fond du plateau, en l’occurrence par l’accrochage de toiles qui créent un espace vertical servant de décor. Notre idée pour cette pièce est de fonctionner à l’inverse, c’est-à-dire de repartir du laboratoire de travail, à la fois salle de répétition et atelier du peintre, et de confondre nos pratiques pour construire un espace théâtral directement issu de l’élaboration d’une œuvre peinte.
Cette rencontre nous a amené à inventer une scénographie pensée autour de deux types de matières qui se déploient jusqu’à envahir totalement l’espace. Cette scénographie s’impose aux danseurs, les contraint à élaborer un corps dansant à la mesure de cet événement scénique qui s’étale. Cette « matière monde » constitue le nouveau milieu dans lequel ils doivent évoluer et se mouvoir, où le corps se transforme et s’adapte plutôt qu’il ne sert d’outil pour construire. m. monnier
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Notre désir d'élaborer une pièce ensemble s'appuie d'abord sur la mise en commun de nos pratiques. Il se forge dans un exercice de traduction réciproque qui interprète ce que l'on voit sur scène du point de vue d'une surface picturale, et cherche en retour à saisir comment ce qui se sédimente sur cette surface, pourrait se déployer dans les modes temporels d'une (écriture)(dramaturgie) scénographique. De ces exercices de traduction, nous retenons trois objets à penser ensemble :
la scène, le tableau : un plan de consistance en commun
Il se découpe dans l'invisible pour tailler une surface soit dans un sol, soit dans un mur. Et c'est en vertu de cette découpe, du seul cadrage fait au hasard dans une étendue qui ne montre rien, que ce plan de consistance rend visible les actes qui viennent s'y inscrire ainsi qu'il rend palpable tous ceux qui resteront hors-champ. C'est le lieu commun de notre écriture.
le théâtre, la salle d'exposition : un dispositif en commun
Une salle noire, une scène et des spectateurs suffisent à convertir n'importe quel événement, ne serait-ce qu'une ampoule qui tomberait soudain du plafond, pour faire de lui le noyau d'un drame ou l'embrayeur d'une histoire dont la force d'attraction attirera à lui tous les évènements et tous les gestes à venir. De la même manière, un espace vide aux murs blancs suffit à lui seul, pour faire voir au spectateur l'extincteur rouge qu'on y accroche comme une œuvre anonyme laissée là. Avant d'être des pratiques de la danse ou de la peinture contemporaine, nos pratiques sont avant tout des pratiques de ce dispositif.
une suite d'instants, un instantané sédimentaire : une dialectique temporelle commune
L'écriture scénographique s'élabore comme une succession d'instants qui s'inscrivent et se déploient en durée sur l'espace de la scène. Et chaque instant suivant est un acte qui s'ancre dans la mémoire de ce qui a précédé, de sorte que chaque geste qui s'ajoute, se répète ou varie, représente aussi bien la durée d'où il vient sans en trahir le moindre détail. Parce qu'il montre en une seule image, l'ensemble de ces processus d'élaboration sédimentés comme un millefeuille transparent, parce qu'il se lit d'un seul instant perceptif qui est à la fois l'archive détaillée et complète de sa propre genèse, le tableau lui aussi produit un mode temporel dialectique. Ce mode commun vise une même mémorisation des actes qui se performent aux fil d'une expérience vécue, cette mémoire est le matériau commun de nos pratiques.
Ces objets de pensée nous les mettrons en pratique ensemble, notre hypothèse, c'est de pouvoir les mettre en scène. Nous partirons de dispositifs qui feront à chaque fois l'expérience d'une combinaison possible de ces trois objets, nous les éprouveront et les passeront à l'examen de nos pratiques respectives. Nous déploierons notre travail à partir de ces hypothèses et de ces expérimentations, il se nourrira de ce que nous ferons. Nous avons hâte de nous mettre au travail. d. figarella
conception mathilde monnier & dominique figarella
chorégraphie mathilde monnier
art visuel dominique figarella
danse yoann demichelis, julien gallée-ferré, thiago granato, i-fang lin
collaboration scénique annie tolleter
son olivier renouf
lumière éric wurtz
réalisation costumes laurence alquier
coproduction
festival montpellier danse 2010 / centre pompidou - les spectacles vivants / festival d’automne - paris / künstlerhaus mousonturm frankfurt et tanzlabor_21 / centre chorégraphique national de montpellier languedoc-roussillon
œuvre de Dominique Figarella réalisée dans le cadre de la commande publique du ministère de la Culture et de la Communication (direction générale de la création artistique/direction régionale des affaires culturelles du languedoc-roussillon.)